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11 avril 2010

Christ est ressuscité !

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Oui, je sais, cela fait déjà huit jours... mais c'est toujours une bonne nouvelle.

J'ai enfin mis la main sur un petit texte de Grégoire de Nysse concernant la résurrection. Il est extrait de son traité contre Eunome. Alors que ce dimanche, nous lisons l'évangile de Thomas, et que, comme lui, nous demandons des preuves, à défaut de toucher le Ressuscité, les arguments de Grégoire peuvent aussi nous faire toucher du doigt la Vérité.

Non seulement l'âme n'est pas restée au séjour des morts, mais la chair elle-même n'a pas vu la corruption. Quant à la divinité du Christ, elle reste identique à elle-même : avant la chair, dans la chair et après la Passion... Mais lors de la Passion, elle a accompli son dessein de rédemption en disjoignant l'âme du corps, pour un temps - elle-même, la divinité, ne se séparait alors ni de l'un, ni de l'autre. Puis elle a réuni le corps et l'âme pour donner à toute la nature humaine le principe et l'argument de sa résurrection d'entre les morts : afin que tout le corruptible revête l'incorruptibilité, et que tout ce qui est mortel revête l'immortalité. (ed. Morel)

Il est vraiment ressuscité !

28 mars 2010

Culture profane et culture religieuse

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Le début de la vie adulte de Moïse nous raconte deux luttes. La première oppose un Hébreu à un Egyptien. Moïse s'interpose et tue l'Egyptien. Quelle signification donner à cet acte ?

Grégoire de Nysse propose deux interprétations. L'une, plus extérieure, où le combat symbolise la rivalité entre la culture profane et la culture religieuse. En effet, dans le monde ordinaire, la culture profane parait souvent plus forte que la culture religieuse : "Et elle a paru telle à beaucoup d'hommes légers qui ont abandonné la foi traditionnelle pour se joindre à ses adversaires et transgresser la doctrine de leurs pères." Cette réflexion de Saint Grégoire est toujours d'actualité et nous avions remarqué que combattre la culture étrangère et ses vices est également un combat contre soi-même.

L'autre interprétation de Grégoire, plus intérieure, l'amène à voir dans le combat celui de pôles opposés. Il se livre en chacun de nous et forme l'essence du combat spirituel. "Ces ennemis qui luttent l'un contre l'autre, comme l'Hébreu et l'Egyptien, ce sont l'idolâtrie et la vraie religion, la tempérance et l'incontinence, la justice et l'injustice, l'humilité et l'orgueil." Là encore, cette vision ne manque pas d'actualité, surtout en période de carême : ne nous faut-il pas lutter sans cesse contre le doute qui s'insinue face à la foi, contre la paresse qui nous menace d'abandonner, contre le découragement qui s'oppose à toutes nos bonnes intentions ?

Moïse est alors l'homme fort qui donne un coup mortel à l'ennemi de la foi.

Quant à la deuxième de lutte de la bible, celle qui oppose deux Hébreux l'un à l'autre, Grégoire de Nysse reconnaît volontiers que si elle n'existait pas aussi "chez nous", "Nous n'aurions pas vu apparaître les néfastes hérésies et leurs doctrines". Force est de constater que les luttes fratricides sont souvent les plus blessantes et les plus sévères.

Doit-on penser que Moïse quittant la protection d'un environnement féminin où l'on s'entraide, entre brutalement dans un environnement masculin où l'on s'entretue ? Moïse, dont on peut noter la sensibilité à l'injustice et la volonté d'aider ses frères est arrêté par la maladresse et la violence de son action. Il est obligé de s'exiler au pays de Madian. Cette fuite le mettra-t-elle à l'écoute des mystères de la foi ?

05 mars 2010

la vie de Moïse et l'Exode

La suite du tableau synoptique des chapitres de la Vie de Moïse et de ceux de l'Exode. Le début est ici.

Grégoire de Nysse

Plan du commentaire de Grégoire

Bible

Chapitres 102 à 111

La sortie d’Egypte, institution de la Pâque

Exode 12, 1 - 51

Chapitres 112 à 116

Les richesses d’Egypte

Exode 11, 2

Chapitres 117 à 121

La colonne de nuée et les tentations

Exode 13, 17 à 14, 14

Chapitres 121 à 129

La traversée de la mer rouge

Exode  14, 15 à 15, 21

Chapitres 130 à 136

Les stations dans le désert, l’eau amère

Exode 15, 22-27 et 17, 1-7

Chapitres 137 à 146

La manne

Exode 16

Chapitres 147 à 151

Les mains étendues de Moïse

Exode 17, 8 - 16

18 février 2010

Bon et joyeux carême

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Ce matin, l'office des lectures propose justement le premier chapitre de l'Exode. Le carême étant ce long temps de préparation à la fête de Pâques, l'Exode est le livre par excellence de l'Ancien Testament qui y dispose le mieux ; et l'Eglise nous le fait lire à cette fin pendant l'office des lectures des trois premières semaines.

Avec Grégoire de Nysse, nous comprenons qu'avec la naissance de Moïse, c'est de naissance spirituelle dont il s'agit. En effet, il commente ainsi :

Ainsi nous avons la possibilité, malgré l'opposition et le mécontentement du tyran, de naître de la meilleure naissance et d'être contemplés avec joie et « conservés vivants » par les parents de ce beau rejeton - les pères de la vertu sont les dispositions de l'âme - malgré l'opposition du tyran.

Le combat spirituel du carême commence bien par laisser une chance à la vie divine de se développer en nous malgré l'afflux des préoccupations qui nous entraînent et l'opposition de nos petits tyrans intérieurs. Que l'ascèse du carême, telle le coffre de Moïse nous aide à surfer sur les flots de l'agitation du monde ! En route pour le voyage en ce temps béni du carême...

17 février 2010

Une histoire de femmes

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La fille de pharaon présentant Moïse à son père

Oups, j'étais un peu surchargée pendant un mois ! Je ne vous ai pas oubliés, pour nous replonger dans la vie de Moïse, je vous propose de reprendre le récit du premier chapitre de l'Exode.

Le peuple des fils d'Israël est devenu trop nombreux et trop forts aux yeux des Egyptiens. Ceux-ci ont peurs qu'ils en viennent à être plus nombreux que les autochtones et finissent par s'emparer du pouvoir. Dans un discours démagogique, Pharaon prend une série de sages mesures pour que ce peuple cesse de se multiplier. L'affectation à des travaux pénibles pour des salaires misérables a pour but de limiter le nombre des naissances. Mais hier comme aujourd'hui, les pauvres sont plus féconds que les riches et  plus on voulait le réduire, plus il se multipliait.  Pharaon va donc établir une nouvelle mesure de contrôle des naissances. Pour éviter que les Egyptiens en aient les mains souillées, il demande aux sages-femmes hébraïques d'accomplir elles-mêmes l'extermination. Craignant Dieu, elles se refusent avec courage à une telle immoralité.

 Alors, Pharaon ordonne à son peuple. Tout garçon nouveau-né, jetez le au fleuve, mais toute fille laissez la vivre. Dans le contexte, il est clair que cette formule s'applique aux Israélites, néanmoins ils ne sont pas mentionnés directement ici. La bible laisse planer un double sens et dans un retournement de situation qui lui est propre, elle appliquera la formule aux Egyptiens quand  les hébreux quitteront l'Egypte, c'est la dixième plaie.

Le deuxième chapitre de l'Exode raconte comment des femmes se comportent face à cet ordre cruel. Une femme, fille de Levi tombe enceinte et engendre un fils. Au bout de trois mois, ne pouvant plus le cacher, elle le met dans une petite barque de papyrus qu'elle a rendu étanche avec du bitume puis, selon l'ordre du pharaon, elle va le placer sur la mer des roseaux. Une autre femme entre alors en scène, la sœur ainée qui va guetter pour voir ce qui arrive, puis c'est la fille de pharaon qui découvre l'enfant et qui comprend tout à fait : c'est un enfant des hébreux. La sœur de Moïse avec finesse, diplomatie et beaucoup d'aplomb, elle qui est esclave s'adressant à la fille de pharaon dit cette phrase admirable : Veux-tu que j'aille appeler une nourrice chez les femmes des hébreux ? Elle pourrait allaiter l'enfant pour toi. C'est ainsi que l'enfant retourne chez sa mère payée pour l'allaiter. Quand il a grandit, la fille du pharaon qui considère Moïse comme son fils, lui donne son nom. C'est pour la fille égyptienne un double acte d'opposition patriarcale : à son propre père et à l'ordre du pharaon !

Irmtraud Fischer, bibliste allemande renommée, dit : "Ce qu'on raconte ici est l'engagement au service de la vie de la part de femmes appartenant à des contextes humains très différents : sage-femme, mère et sœur, esclave et fille de roi. Les femmes initient une relation entre elles par-delà les frontières des générations et des peuples, par-delà les barrières sociales, et elles agissent solidaires pour réaliser un but : contre le décret porteur de mort, préserver la vie ... elles agissent suivant leur propre estimation, suivant leur propre critères éthiques. Toutes se décident de manière réfléchie pour la désobéissance civique." (cf. ici)

Bien évidemment, Grégoire de Nysse ne conserve pas cette couleur féminine dans son commentaire, car, à la suite du judaïsme alexandrin, il applique le thème de l'enfantement à la naissance des vertus ou des vices dans l'âme, naissance libre et toujours en devenir d'instant en instant : elle est le résultat d'un choix libre et nous sommes ainsi en un sens nos propres parents, nous créant nous-mêmes tels que nous voulons être et par notre volonté nous façonnant selon le modèle que nous choisissons, ou mâle ou femelle, par la vertu ou par le vice. Et bien sûr, les vertus sont mâles et les vices femelles ! C'est ce qui lui fera dire de sa sœur Macrine : on pouvait dire d'elle que c'était un homme puisqu'elle avait cultivé les vertus à leur plus haut degré de perfection.

Alors que le raisonnement de Grégoire de Nysse sur l'acquisition des vertus dans la voie de la sainteté est juste et évocateur, la symbolique utilisée est malheureuse et sera préjudiciable aux femmes. C'est pourtant l'attitude générale des pères de l'Eglise ... dont l'époque ignorait le raisonnement holistique et la complémentarité apportée par la relation.

Pour la défense de Grégoire, il faut que remarquer que la traduction de la septante qu'il a vraisemblablement utilisée traduit un pluriel "ils" là où l'hébreu dit "elle" : elle le cacha, elle le mit etc...

Cette belle histoire féminine de défense de la vie, qui prélude à toute éducation, méritait un détour.